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». je commence par cette histoire pour pointer l’illusion mémorielle d’un « nous » purement identitaire : le « nous » d'une mémoire vivante est un « nous éthique », un nous qui se déplace pour dire sa sensibilité à des conditions semblables, et pour agir. dans un premier temps, je voudrais déployer les grandes lignes de la condition de réfugié, jadis et aujourd'hui — je dis aujourd'hui car il y a des éléments inédits qui sont en train de bouleverser cette condition. dans un second temps je voudrais revenir sur la condition hospitalière, c'est-à-dire les conditions d'une hospitalité soutenable, et le rythme fondamental de l'hospitalité, entre le temps de l'urgence inconditionnelle, et celui de la reconstitution d'un pacte qui fasse place à la réciprocité. avant de commencer, je voudrais dire aussi le point d'où je vais parler cet après-midi : je suis rentré il y a quelques jours d'istanbul, où j'ai un fils qui habite, et je suis très inquiet de ce qui se prépare là-bas, et sur toutes ces frontières que nous avons trop longtemps négligées. il va falloir encaisser un nouveau choc de l'histoire, et nous réorganiser pour l'accueillir. 1. la condition de réfugié, et le rythme migratoire de toute antiquité, il y a une asymétrie de conditions, et aussi de droits et de devoirs, entre ceux qui sont « chez eux » et ceux qui sont « étrangers ». le devoir d'hospitalité fait partie de tous les devoirs de protection du fort au faible. il illustre la responsabilité de celui qui est « déjà là » à l’égard du « nouveau venu », de l'habitant à l’égard du passant. à cet égard, un exilé, un réfugié, un étranger de passage, est tout autant un « faible », quelqu'un de démuni, que peut l'être un petit enfant : les bébés aussi sont des nouveaux venus ! d’un autre côté, il y a une profonde ambivalence de la figure de l'étranger, qui pouvait être un dieu déguisé — ou plus simplement, en régime chrétien, une image de dieu, un visage de l’incognito du christ. mais de la même manière il pouvait aussi être un ennemi, un prédateur, un envahisseur hostile, un hostis . selon les cultures et des traditions il y a mille manières d'accueillir, mille manières de se faire accueillir. la sociologie des réfugiés européens pour motif religieux, dissidents, proscrits, rescapés de persécutions, colons de tous poils partis pour refaire une société nouvelle selon leurs vœux, a produit des sociétés d'immigration pluralistes, en tout cas davantage pluralistes que les nations restées seules sur leur territoire. georg simmel, illustrant le chicago du milieu du xixe siècle, écrivait que l'étranger qui vient d'entrer dans la ville avec son baluchon devait être regardé derrière un respectueux voile d'ignorance, comme on regarde un enfant, car on ne sait pas ce qu'il va devenir : peut-être que dans dix ou vingt ans il en sera le maire. parmi les réfugiés qui se pressent aux portes de l'europe, il y a probablement les pierre bayle et les denis papin de demain, mais il y aussi, comme il y avait alors, des bandits et simplement des pique-assiettes ! comme partout, comme toujours. tout est donc plus compliqué : il y a certes des rescapés d’une faiblesse extrême, et dénués de tout, et des habitants bien protégés dans leur propriété et la défense de leur « forme de vie ». mais il y a aussi des populations attachées à leurs paysages, qu'elles ont travaillé et jardiné depuis des générations, et qui se retrouvent dépaysées chez elles, dans des paysages saccagés par la mondialisation et l’accélération des échanges. il y a des flux migratoires de touristes heureux qui passent sans entraves toutes les frontières sans même parvenir à éprouver le moindre dépaysement. il y a des populations incarcérées dans des territoires inhospitaliers, invivables, ou coincées dans des espaces frontaliers qui forment des bourrelets de camps, dans de quasi-no man’s lands. il y a enfin des bandits, prêts à marcher sur la tête de leurs parents, à larguer femme et enfants, pour manger à d’autres râteliers, indifférents à tout civisme dans leur propre pays. tout cela existe mêlé. de toute façon il n'y a pas d'autochtones, au sens propre « nés de la terre » : personne n'est entièrement « chez soi », nous sommes tous des descendants de colons, le peuplement de nos pays s’est fait par colonisations successives, et comme me le disait ici même le doyen jean carbonnier brisant l’idéologie des racines : de ces pierres dieu pourrait tirer une descendance à abraham ! ce qui est nouveau, cependant, apparaît comme une rupture de rythme, une accélération massive. elle est peut-être due à des évolutions technologiques dans les modes de déplacements physiques, les transports, mais aussi psychiques et imaginaires, les réseaux de communication. elle est certainement due à des crises guerrières, alimentaires, à des destructions d'écosystème, qui mettent ce que notre humanité a de vulnérable, les corps humains vivants, dans une situation mortelle de harassement et de désarroi. en bien des endroits du monde, cette accélération globalisée ne défait pas seulement les etats, mais les sociétés. les populations déplacées, leur augmentation constante, en sont le symptôme. ce qui change ainsi, c'est que jadis, en temps normal, les étrangers et même les réfugiés, les exilés, arrivaient un par un, comme nos enfants. ce qui nous arrive, et qui est parfois perçu moins comme l'arrivée de réfugiés qui nous ressemblent, des minorités persécutées, que comme de nouvelles « invasions barbares » qui réveillent les traumatismes de notre vieux monde latin, ce sont des migrations en masse. c'est une question de rythme, et l'hospitalité mesurée, bien mesurée, souvent trop mesurée, se transforme en hostilité. certains voudraient pouvoir trier, choisir leurs réfugiés, comme ils prétendent choisir leurs enfants. c'est pourquoi à nouveau, après une période, si brève à l'échelle de l'histoire, où nous avions cru pouvoir liquider les frontières dans un nouvel ordre mondial libéral, surgissent et se durcissent des frontières nouvelles, impitoyables, barbares. la nouvelle frontière est douce à ceux qui comme nous sommes dedans et pouvons en sortir, et d’une dureté terrible pour ceux qui voudraient entrer, et qui en sont exclus. ici encore, nous aimerions pouvoir rapport